BD Classic

La famille Aergisson est désormais à nouveau réunie au village et la vie quotidienne a repris son cours; seul de temps à autre, le village de pêcheurs accueille des voyageurs de passage. 

Pourtant un soir, le destin frappera une fois encore nos héros, par la lame d’un poignard vengeur, tenu par une jeune femme voulant se venger d’un monstre aux mains rouges de sang : Shaïgan-sans-merci !  Si Thorgal échappera à cette tentative de meurtre, elle par contre en mourra, non sans avoir exigé le Weirgild, le prix du sang : Une vie pour une vie !
Puisque Thorgal n’est plus ce démon, il devra libérer son peuple de l’emprise d’un autre démon : Ivarr-le-glacé, au royaume du Nord, Sudreyjar…

Une nouvelle fois, les Dieux mettent à l’épreuve Thorgal.

Ce qu’on en a pensé…

En Préambule…

Thorgal a été pour moi la toute première série que j’ai acheté en one-shot, en coup de cœur absolu ! 16 tomes d’un coup, après avoir découvert la série grâce aux « Les archers » suivi du « Pays Qâ ».  Depuis cette période, j’ai toujours acheté en Day one les nouveaux tomes, spin off compris.  Pourtant, et c’est l’énorme paradoxe de la série, les derniers scénarisés par Jean Van Hamme et surtout tout ceux commis par Yves Sente, je ne reconnaissais plus mon Héros slave !  Le paroxysme a été le dernier dessiné par Rosinski (le #36, « Aniel ») que j’ai acheté sans l’avoir jamais lu avant la sortie de ce tome 37…. Pour quelle raison ?  Un vrai dégout (pardon pour ce terme fort) du travail totalement bâclé d’Yves Sente, additionné de l’énorme crise d’égo de Rosinski face à un nouveau scénariste (Xavier Dorison) qui aurait été pourtant capable lui d’amener un souffle nouveau à cette série en déserrance totale…

Je m’étais donc juré de tourner le dos à cette série… jusqu’à ce que ce tome 37 arrive à la rédaktion…. Nouveau dessinateur, nouveau départ scénaristique par Yann…  Allons, mettons notre affect’ de côté et lançons-nous avec les chakras ouverts dans ce renouveau annoncé de Thorgal... Quitte à être une nouvelle fois décu!

 

Scénaristiquement parlant…

Et c'est le premier choc: Yann parvient à relancer habilement la machine, en se basant sur 3 éléments fondateurs :

• Thorgal, toujours hanté par les méfaits commis lorsqu’il était sous l’emprise de Kriss de Valnor, cherche à réparer ses fautes ;
• Un inextinguible amour de la liberté : Tous les choix posés prennent en compte ce besoin animal, instinctif de notre héros.
• Et puis enfin L’oppression du peuple par les puissants ; cet élément moteur fait partie intégrante des meilleurs scénarios de Jean Van Hamme ; notre nouveau scénariste l’a bien compris et a remis en avant ce trait de caractère fort avec efficience.

En ce sens, l’argumentation de Thorgal face à un Ivarr se posant en sauveur de son peuple est diablement efficace : « Persécuter son prochain pour son bien… J’ai trop souvent entendu ce genre de fadaises !  Toute liberté est sacrée : vous devez laisser ces pèlerins libres d’affronter leur rituel, si telle est leur volonté ».

Voilà du vrai Thorgal, du Thorgal qui s’enflamme avec justesse pour une cause auquel il croit viscéralement !

La quête ensuite vers l’île de Skellingar est dans la droite lignée des plus périlleuses épreuves, le tout rehaussé d’une énigmatique mise en garde par une prophétesse….

La suite de l’histoire ne sera pas déceptive : courage, forces naturelles mâtinées d’un zeste de surnaturelles, mythologie… et surtout vraie profondeur scénaristique !!!  Sans trop en dévoiler, le dénouement final sera inattendu et surtout très bien amené ! Là aussi, bien joué…

Graphiquement parlant…

Là encore, je n’étais plus du tout en phase avec les représentations/expérimentations graphiques de Rosinski : si je pouvais comprendre sa démarche artistique, dans les faits je ne reconnaissais plus -là non plus- le Thorgal de mon adolescence…  A mes yeux, le trait de Rosinski avait atteint sa plénitude très tôt : le #5 « Au-delà des ombres » est absolument magnifique… 

Fred Vignaux propose « sa » vision de cet univers.  De l’héritage graphique laissé par son maitre de prédécesseur, il aura réussi à tout d’abord trouver ses marques sur la série Spin off « Kriss de Valnor » (pour les tomes 7 & 8), pour ensuite parvenir à faire apparaitre sur ses planches un trait « Rosinskiyen » mais appuyé d’une solide plume qui lui est propre…

Dernier aspect sur ce point, la mise en page est très efficace, nous permettant une lecture extrêmement fluide tout en étant originale à certains moments : ainsi

la représentation de l’affrontement Shaïgan vs Thorgal  est très forte dans la symbolique : Thorgal  pénétrant dans les tréfonds de son âme et émergeant sur les connexions synaptiques reliant ses neurones sur lesquels la confrontation des 2 personnalités antagonistiques s’affrontent…. Bravo !

Le seul défaut que je trouve à cet album n’incombe pas aux auteurs, mais plutôt à l’éditeur : quand on voit la qualité du papier de certaines productions aujourd’hui, comment se fait-il qu’un Blockbuster comme Thorgal soit imprimé sur un papier d’aussi mauvaise facture !?!  Les pages sont déjà gondolées avant la première lecture, tellement ce support est fin ?  Incompréhensible…

 

 

En conclusion…

Le bâtard des étoiles est-il enfin de retour ?  Il est encore trop tôt pour le dire, mais le duo Yann / Fred Vignaux semble capable de reprendre les rames de l’épique destinée de notre famille du Nord ! 

Pour ceux d’entre vous donc qui souhaite clore définitivement l’histoire, ce #37 fermera parfaitement les portes ; pour les autres, il pourra en ouvrir de nouvelles…. Pour ma part, je découvrirai donc le prochain tome avec intérêt !

Saine pression donc sur les repreneurs : rallumez définitivement notre flamme de lecteurs épris de ce monde délaissé par les Dieux depuis une bien triste décennie !

Milan Morales