Mon père, cet enfer
Dessinateur : Travis Dandro
Scénariste : Travis Dandro
Editeur: Gallimard
Travis est un petit garçon comme les autres : il vit chez ses parents et son oncle David l’emmène régulièrement faire des activités le week-end.
A l’âge de 6 ans, Travis apprend que David est son père biologique. Travis va découvrir progressivement que ce père n’est pas idéal, car consommant de la drogue (par traumatisme suite au suicide de son frère ?) et peu en accord avec la légalité ; ce qui lui vaudra un séjour en prison.
Travis va se rendre compte que sa mère est encore fort amoureuse de son père, elle va quitter l’homme avec qui elle vit pour lui, mais va se rendre compte que, contrairement à ce qu’il prétend, Dave n’a pas résolu ses problèmes de stupéfiants ; ce qui entraînera de la violence et la fuite.
Pour éviter le retour de David, Travis doit se réfugier chez un oncle alcoolo avec sa mère et son frère avec l’angoisse de la voir débarquer…
Un moment de soulagement arrivera avec l’emprisonnement de David, mais celui-ci sera de courte durée, car, dès sa sortie de prison , David parvient à convaincre sa mère qu’il a changé… Devenu adolescent, Travis comprend mieux ce qu’il se passe. Bien qu’il soit en colère contre son père, il accepte la présence de celui-ci pour faire plaisir à sa mère.
Ce changement ne dure pas longtemps et David retombe vite dans la drogue, David s’en prend à sa femme et Travis veut venger sa mère avec un couteau, on l’arrête à temps… Cela entraîne une rupture définitive du couple et quelques semaines plus tard, David met fin à ses jours… Travis est partagé entre le soulagement de ne plus être tracassé par son père et le regret lié au souvenir de bons moments passés avec lui…
« Mon père cet enfer » est une grosse brique de 464 pages, mais qui peut se lire en une fois, car plusieurs planches sont dans dialogues, évoquant des moments particuliers du temps qui passe… Le récit est autobiographique, Travis Dandro racontant son enfance et dédiant ce livre à sa mère.
Si le résumé ne le laisse pas nécessairement deviner, le récit laisse largement la place à une vision humaine des relations entre les personnages, la vie de Travis est d’abord celle d’un enfant qui partage des bons moments avec ses parents, fait des bêtises de gamin et apprécie le contact humain…
Même si le titre « Mon père cet enfer » est fort dur, l’enfer n’est pas caricaturé dans le livre. Certes, il y a des moments d’angoisses (cauchemars…) et de colère bien légitimes vécus par Travis contre son père, mais il y aussi de l’ambiguïté, peut-être une certaine forme de pitié pour l’homme dépendant aux produits stupéfiants qui ne s’est jamais remis du suicide de son frère… Le constat final est celui d’un énorme gâchis et on peut comprendre que Travis a voulu l’ « exorciser » en racontant son histoire dans un livre (jusqu’alors, l’auteur s’était davantage consacré à des ouvrages humoristiques). La démarche est assez similaire au livre « Une touche de couleur » chroniqué récemment sur ce site…
Cette démarche salutaire de l’auteur d’exprimer ses souffrances passées et sa profonde humanité pour ses proches ne peut que toucher le lecteur ; elle nous rappelle combien parfois une jeunesse peut être fragilisée quand les adultes sont mal dans leur peau. Plutôt que de se lancer dans un manichéisme trop caricatural, Travis Dandro préfère aborder ce qui est bon dans chaque être humain sans occulter pour autant ce qui le rend parfois si blessant. Le dessin un peu « cartoon » permet peut-être de faciliter cette prise de distance sans que cela ne nuise à la lisibilité du récit. Un roman graphique à conseiller pour ceux qui comme moi aiment lire ces parcours de vie…