Interview de Léonard Chemineau, un ami de Pancho Villa

Viva la revoluçion ! Pour sa première BD, Léonard Chemineau s’attaque à une adaptation d’un auteur d’origine mexicaine, James Carlos Blake. Pour le tas de gringos incultes que vous êtes, ce gars a déjà livré de nombreux récits biographiques plus ou moins romancés et haut en couleur de « personnages » qui ont vécu des deux côtés du Rio Grande. « Les Amis de Pancho Villa » raconte l’histoire de Rodolfo Fierro, lieutenant de la révolution au côté de sus-dit Pancho Villa. C’est un ancien repris de justice pour qui la vie ne vaut pas grand-chose et qui tue avant d’être tué, souvent gratuitement parfois pour l’honneur si ce n’est pour l’horreur et qui finalement s’en sortira indemne, à un membre près. Mais quand on a survécu à cette période tumultueuse de l’histoire mexicaine on peut s’estimer heureux de mourir dans son lit, de vieillesse.

 

Le récit de ce guerrier qui regarde tous les jours la mort dans les yeux est mené tambour battant par ce jeune Léonard Chemineau qui doit assurément compter dans ses favoris Quentin Tarantino et Sergio Leone. Car c’est de cela qu’il s’agit, un western spaghetti qui, chose surprenante, trouve sa place dans une collection dédiée au polar mais sans que cela ne gêne personne. Première œuvre, c’est vous dire si l’auteur a réussi à impressionner ses éditeurs par ses qualités narratives aussi bien que graphiques (voyez cette couverture, une merveille !). Pour un début, c’est un début fracassant ! Quant à cette collection Casterman/Rivages/Noir nommée d’après la collection de polars Rivages/Noir, elle continue a tenir ses promesses, volume après volume, présentant des jeunes auteurs ou des confirmés qui ont vendu leur âme au polar et qui mettent en images les plus grands auteurs policiers de la planète. Avec Ecritures, une des meilleures collection de Casterman.

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Léonard Chemineau s’exprime à ce sujet :

 

J’ai fait Les Amis de Pancho Villa sur proposition de Casterman. Au départ, en 2009, j’ai été sélectionné au concours jeunes talents d‘Angoulême. Dans mes cartons j’avais un projet d’adaptation ayant un lien avec la révolution mexicaine : « L’Escadron guillotine » de Guillermo Arriaga, qui se passe au même moment, a les mêmes thèmes. Les projets de Casterman correspondaient aux miens mais ils étaient plus intéressés par le bouquin de Blake. J’ai donc démarré l’adaptation.

J’ai proposé de faire toute l’adaptation, comme cela on est libre de faire ce qu’on veut tout en respectant le livre. J’ai mis un an, de janvier 2009 à janvier 2010, pour faire le projet d’adaptation et qu’il soit approuvé par l’éditeur. Ensuite j’ai commencé par le « chemin de fer », c’est-à-dire réfléchir à ce qu’on va mettre dans l’album, en combien de pages et dés l’aboutissement du format et l’enchaînement des séquences je suis passé au story-board, page après page, écrivant tout ce qu’il va y avoir dans l’album. Cela terminé, direction Casterman pour correction et dés le feu vert des directeurs de collection, du comité éditorial démarrage des planches. Chemin de fer et story-board ont pris six mois parce qu’en plus je bossais.

Au point de vue de la documentation, j’ai de la chance que cette période de l’histoire du Mexique soit très bien documentée, une période couverte par les photographes et les cameramen mexicains et américains. Ils se sont même servis de séquences de la révolution mexicaine pour tourner des films à Hollywood !

Tous les personnages de l’album ont existé sauf le personnage de la mort ! Il faut savoir cela avant de lire l’album, histoire de réaliser que tout cela est réel. Rodolfo Fierro a réussi à traverser toute cette période sans se faire tuer. C’est un personnage emblématique de l’époque, il n’attache pas beaucoup d’importance à la vie, à la mort. Ces révolutionnaires, c’étaient des fous furieux ! Et puis c’était intéressant, cela jetait un regard plus original de vivre cette histoire non pas à travers les yeux de Pancho Villa mais à travers ceux de son lieutenant…

Je suis en train de réfléchir sur un projet qui se passerait à notre époque, en Amérique latine et un autre – au stade de réflexion – sur les conséquence de la crise économique à notre échelle, des conséquences très particulières, une histoire inédite mais qui vaut le coup ! Je n’ai pas attendu que « Pancho Villa » soit achevé pour foncer sur un autre projet.

Mon premier bouquin, c’est irréel ! Quand j’ai vu l’album dans les rayonnages je n’y croyais pas vraiment mais au fur et à mesure j’ai fini par me rendre compte que c’était là ! Surtout qu’il plaît. Et puis cette collection Casterman/Rivages/Noir, je me retrouve avec des grands noms : Matz, Loustal, Chauzy, Hyman… Mais c’est Giraud/Moebius mon maître à penser. Après étant gamin avoir dévoré Lagaffe et Lucky Luke, dont je recopiais les pages, j’ai découvert Blueberry et Moebius, le choc !

Je n’ai pas envie de rester figé dans un style… Il y a une différence entre le début et la fin de l’album, vers la fin il y a plus de dynamisme dans le mouvement. Quand je parcours les premiers dessins, je me dis que j’aurais pu faire ça ou ça… En tant que lecteur j’adore le format de cette collection, quand je me balade j’aime bien avoir une BD dans mon sac, un truc qui se lit facilement et 130 pages ça peut se lire comme un roman !

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