Les amants d'Hérouville
Dessinateur : Romain Ronzeau
Coloriste : Romain Ronzeau
Scénariste : Yann Le Quellec
Editeur: Delcourt

On aurait pu appeler cet album « Grandeur et décadence » car, plus qu’une histoire d’amour, c’est surtout le parcours hors du commun d’un homme dont je n’avais personnellement jamais entendu parler jusqu’ici dont il s’agit.
Certes la relation amoureuse entre Michel Magne et Marie-Claude Calvet est importante, mais le livre déborde nettement de cette période amoureuse et agitée du château d’Hérouville car elle aborde aussi l’enfance de Michel Magne et sa passion très précoce pour la musique, son caractère non conventionnel l’amène à développer de la musique très expérimentale, il réalisera un concert d’infrasons inaudibles qui rendra le public malade à cause des vibrations. Il réalisera aussi « Carillon dans l’eau bouillante » où la salle manquera de brûler, un autre concert où des chirurgiens opèrent une femme nue dans un piano sans compter des solos de jambon qui ne seront jamais joués, car des clochards s’en étaient régalés…
Très riche en informations (le résumé n’en reprend que quelques grands traits), on découvre un personnage qui a mené une vie incroyable, iconoclaste, mais qui était également un prodige et un précurseur (il testait la musique électronique avant l’apparition de synthétiseurs). Il a créé les musiques de film pour « Fantômas », « Un singe en hiver », « Les tontons flingueurs » et bien d’autres encore… Il a aussi côtoyé les plus grands (la liste ne saurait être exhaustive) et menait un train de vie sans répit. A-t-il été victime de son succès ? De sa « mégalomanie » dans le sens où il avait peu de limites ? Cet homme, bourreau de travail, mais aussi au caractère très festif est finalement très attachant.

Il faut bien les 260 pages pour en découvrir toutes les facettes. De manière intelligente, le livre est entrecoupé de parenthèses où l’on découvre l’un ou l’autre aspect de la vie de Michel Magne… Pour concrétiser encore davantage que ce personnage hors du commun a bien existé, le livre comporte de nombreuses photos d’époque qui complètent les événements dessinés, il comporte un épilogue uniquement en photos où Marie-Claude Calvet, revenue dans le château d’Hérouville, 40 ans après, se souvient... Notons également une postface d’Eddy Mitchell, de Bill Wyman et de Sempé, une discographie de Michel Magne et un relevé de nombreux morceaux enregistrés dans les studios du château.
Parce que ce travail est très complet de Yann Le Quellec et bien mis en page par Romain Ronzeau, parce qu’il immerge bien le lecteur dans l’ambiance des années 70 mais également parce qu’il m’a fait découvrir un homme à la personnalité attachante dont j’ignorais l’existence, je donne un coup de cœur bien mérité à cet album.