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Barracuda # 1
Série: Barracuda # 1
Auteurs: Dufaux / Jérémy
Editeur: Dargaud
Une chronique BD:
Génération BD
© Dargaud
Présentation de la BD «Barracuda # 1» :
Blackdog, capitaine du Barracuda lance son équipage à l’abordage d’un vaisseau espagnol qui ne résiste pas longtemps à la férocité de ses pirates assoiffés de sang. Bonne prise, avec en bonus quelques belles femmes qui rapporteront gros sur le marché des esclaves et une carte au trésor. Abandonnant à leur sort ces femmes dont toutes ne sont pas ce qu’elles prétendent être, son fils blessé dans un duel avec le capitaine espagnol, le Barracuda part à la chasse au butin, ce diamant de Kashar dont les mauvais langues disent qu’il est maudit… Mais des mauvaises langues, les pirates n’en ont que faire…
L’avis de Shesivan :
« Barracuda » est l’histoire de pirates que Dufaux avait envie de faire. Jean Dufaux, scénariste d’une prodigalité invraisemblable, auteur de séries comme Croisade avec ( Ph. Xavier), Djinn avec (Ana Mirallès), Giacomo C (avec Griffo), Le Bois des vierges (avec Béatrice Tillier)…
Des histoires de pirates, il y en a des tonnes en BD mais ce n’est pas toujours un gage de qualité. Dans son introduction, Dufaux fait fi de ses confrères tout en saluant l’excellence de la série de Dorison et Lauffray : Long John Silver. Il rend surtout hommage aux films de pirates qui ont bercé sa jeunesse et enflammé son imagination, des acteurs comme Errol Flynn, des réalisateurs comme Michael Curtiz, Siodmak et même Polanski...
Mais Jean Dufaux, s’il a voulu dés le départ nous balancer une classique histoire de pirates avec abordage et carte au trésor, a décidé ensuite de brouiller les cartes pour poursuivre l’aventure sur la terre ferme. Il a accosté pour centrer le sujet de ce premier épisode sur le destin de ces trois adolescents, dont un est plutôt ambigu.
Jugez-en… Emilio, jeune nobliau obligé de se déguiser en fille parce que les pirates passent tous les hommes par le fil de l’épée. Plus tard, il avoue aimer ce déguisement… Réduit en esclavage, il est racheté par un gentilhomme dont le faciès et nom rendent hommage à l’acteur Flynn…. Est-ce un pirate ? Pourquoi agit-il ainsi puisqu’il n’ignore rien de l’identité réelle d’Emilio/Emilia ?
Deuxième ado, Raffy, fils du maître du Barracuda, élevé dans la violence et le sang. Blessé, humilié d’avoir perdu son duel contre le capitaine espagnol, il est ivre de vengeance et trépigne d’impatience sur son lit de douleur...
La dernière ado, Maria, la fille d’une noble espagnole morte peu après avoir été sauvée de la sauvagerie des pirates par des religieux, vient de perdre toute humanité, livrée à un esclavagiste impitoyable, bien décidé à briser sa volonté.
Dufaux, en maître scénariste, a utilisé ce premier épisode pour donner de la profondeur à ses personnages, quitte par la suite à reprendre la trame, c’est-à-dire la chasse au trésor.
Mais place à présent au dessinateur de « Barracuda », dont c’est la première œuvre. Et quelle œuvre ! Pouvait-on imaginer début plus prometteur ? Il faut dire que Jérémy a été à bonne école. Celle de Philippe Delaby, merveilleux dessinateur de la Complainte des landes perdues et de Murena, dont il assure les couleurs sous son nom complet. Il y a fort à parier qu’il a appris du maître et ensuite a révélé son travail au duo des œuvres citées plus haut.
Jusqu’à ce que Dufaux lui propose ce projet…
Il ne s’est pas fait prier pour foncer, malgré la difficulté de la tâche (ces scènes d’abordage, presque des fresques, la multiplicité des personnages… ) et sans doute une certaine pression exercée (malgré eux) par la qualité de ses parrains...
Chapeau, Jérémy a été jusqu’au bout de son ambition. Prenez pour exemple cette superbe couverture, le regard de cet homme qui a l’air de vous transpercer. Un regard de loup de mer, de loup tout court, ce visage labouré par des cicatrices. Infime signe de civilisation, la barbiche impeccablement taillée et ces boucles d’oreilles, assez d’or pour se payer une inhumation décente… Remarquablement sinistre…
Quant aux couleurs, nous avons affaire à un spécialiste, rien n’est trop chargé sous des couches, un travail tout en délicatesse pour se marier avec le trait et non pour l’alourdir.
Et voilà, cinquante pages plus tard, Jérémy vient de se faire un prénom dans la BD !
A quand la suite ?
Pour la parution de Barracuda, les éditions Dargaud ont mis les petits plats dans les grands puisque l’ouvrage est préfacé d’une double page d’introduction de Jean Dufaux ainsi qu’un cahier de dessins et croquis de Jérémy, c’est vous dire la qualité de la chose !
Pour en apprendre plus sur Jérémy : http://Jérémy-bd.blogspot.com/
Shesivan
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