Série: Terra Australis
Auteurs: LF Bollée, Philippe Nicloux
Editeur BD: Glenat
Une chronique BD: Génération BD
L'histoire :
Fin 18ème siècle James Cook découvre l'Australie. Même époque à Londres, les prisons du Royaume débordent de prisonniers. Dans la plus grande d'entre elle est envoyé John Hudson, petit ramoneur de 9 ans ayant volé un bibelot pour pouvoir se payer à manger.
Afin de solutionner l'engorgement des prisons et pour établir une colonie, on a l'idée d'envoyer en déportation, comme colons forcés, une série de bagnards et prostituées, vers Botany Bay en Australie découverte par Cook peu de temps auparavant. Quinze cents hommes et femmes seront ainsi déportés au cours d'un long voyage de plus de neuf mois.
Mon avis :
Une découverte que ce pavé de 500 pages élaboré en 4 ans par Bollée (Apocalypse Mania, Ultime Chimère) et Philippe Nicloux qui signe ici son premier album. L'éditeur aurait pu décider de publier en morceaux de 5 ou 6 albums mais il a fait le choix de publier en un bloc, ce qui évite l'attente même si cela augmente aussi le prix en une fois (comptez tout de même 45 € pour ce bouquin).
Une découverte car comme beaucoup je pense, j'ignorais totalement cette partie de l'histoire expliquant comment l'Australie de nos jours a été colonisée par les Blancs il y a un peu plus de 220 ans. Terra Australis c'est la Nouvelle Galles du Sud, c'est Botany Bay vers laquelle les Anglais vont envoyer bagnards, prostituées et rebuts de la société londonienne qui surpeuplent les prisons du Royaume.
Ce récit humaniste nous relate les conditions au 18ème siècle à Londres, le voyage épique, long et douloureux durant plus de 9 mois (il y aura même des naissances durant le voyage!) pour rejoindre cette terre lointaine, et toute la misère humaine. A bord de onze navires, ce sont 1.500 personnes, qui parcoureront 24.000 km afin de rejoindre la terre promise! Le livre est découpé en 5 parties: prologue, 3 chapitres (horizons lointains, voyage, bandaiyan) et un épilogue étonnant. On y suit la destinée de Philip, capitaine de vaisseau en fin de carrière, envoyé comme gouverneur sur cette nouvelle colonie; de Caesar, ancien esclave africain affranchi mais toujours bagnard en cavale; du jeune John Hudson, 8 ans à peine et condamné à 7 ans d'emprisonnement pour avoir volé afin de pouvoir manger; de Smith, et puis de Beebelong, le jeune aborigène capturé pour lui apprendre l'Anglais et pouvoir communiquer.
Bollée construit superbement son récit, partant et revenant dans le bush australien, avec de beaux parallèles mis en image comme la scène de l'arrachage de dent et l'expédition punitive sur le bateau de Cook, ou encore le final avec Beebelong et Philip. Nicloux nous offre de belles transitions comme la scène sans parole avec l'oiseau volant des pages 395 à 400, ou encore plusieurs doubles pages dans le récit, tout à la technique du lavis, dans les tons grisés.
Beaucoup de passion, un peu de scènes de violence, la misère au quotidien, la promiscuité sur les navires, les contacts et relations avec les "naturels"ou les "ab-origines" comme ils sont appelés. Un bel album donc, riche et dense, mêlant habillement faits et personnages historiques (l'explorateur la Pérouse) avec des personnages de fiction, et dont la lecture vous interpelle et un livre que l'on n'oublie pas une fois refermé!
Maroulf