BD Classic

Alice fait partie de ces petites filles romantiques pour qui il n’existe pas de frontière entre la réalité et la magie des contes, elle s’immerge dans l’harmonie de la nature, contrairement à ses deux frères particulièrement insupportables. Sa vie va changer lorsqu’elle va découvrir au milieu de la forêt le chêne sacré dans le lieu-dit « la vallée aux loups », non loin du chalet bleu. C’est là que Cybèle, déesse et mère des dieux, a couvé un amour pour un berger nommé Attis avec qui elle a eu un fils nommé Jeantou. Celui-ci, séduit par une nymphe, trahit sa fidélité et fut transformé en chêne par la déesse. Alice va continuer à fréquenter ce monde féérique, côtoyant un jeune homme mystérieux et séduisant mais ces escapades ne sont pas au goût de ses parents qui veulent l’envoyer en ville pour ses 13 ans. Alice n’aura d’autre issue de s’échapper et se réfugier dans le monde secret de la forêt, vivant en harmonie avec son nouveau compagnon. Quand Alice va rendre compte que son compagnon est en fait Jeantou, le fils de Cybèle, cette dernière va unir les deux amants qui vont former un vrai couple. De leur union va naître une fille Rose qui grandira et deviendra une jeune femme. A son tour, elle découvrira l’amour et quittera la forêt enchantée pour découvrir le monde.  Un peu désemparé par le départ de sa fille, Jeantou va suivre sa propre quête pour finalement se rendre compte que le trésor que nous cherchons toute notre vie est parfois juste enfoui au plus profond de nous-même…

Jean-Claude Servais renoue avec ses fondamentaux qu’il avait « un peu » quitté pour certains récits plus contemporains. Avec le chalet bleu, il reprend ses thèmes de prédilection tels que: l’harmonie  avec la nature, la magie des contes qui deviennent réalités pour ceux qui savent les écouter, la symbiose amoureuse entre deux êtres humains,… Le style Servais n’évolue pas mais qui pourrait s’en plaindre ? Le dessin reste toujours très rigoureux, naturaliste. Ils sont même encore sublimés davantage par les couleurs de Raives. L’auteur est devenu spécialiste pour mettre sur papier ses observations de la forêt. Pour cet album, il décide même de s’établir dans le chalet bleu pour écrire son scénario.

Parce que chaque album nous replonge dans une harmonie de la nature finalement bien à contre-courant des inquiétudes climatiques (où est-ce pour nous la faire encore regretter davantage ?), parce que l’on se sent une âme d’enfant qui redécouvre la magie du conte, parce quelque part nous avons tous un chalet bleu enfoui au plus profond de nous,… Pour tout cela et bien d’autres choses encore on se laisse emmener une fois encore dans le monde imaginaire de Servais et, tant qu’à faire, autant accompagner la lecture d’un bon Orval !

Si vous êtes un fan invétéré de Servais (comme pas loin de 100% des habitants des Ardennes belges), vous vous plongerez dans le récit comme le vigneron savoure sa dernière cuvée. Vous ne serez pas déçu car c’est un Servais et donc, bon comme il se doit. Si cette ambiance de contes et légendes de l’auteur ne vous a pas accrochée dans le passé (il paraît que cela arrive encore), je ne peux que vous souhaiter de trouver votre chalet bleu !

Beaucoup d’album de Servais mériteraient un coup de cœur mais parce que je trouve que le dessinateur s’est encore une fois surpassé dans ses dessins où l’on est immergé dans la nature, je le lui donne volontiers pour cet album !