Interview de Yann, Jean et Simon Léturgie pour Gastoon

GASTOON – Gaffe au neveu !

gastoon interview

A l’occasion de la sortie prochaine de « Gastoon # 1 : Gaffe au neveu », voici un interview des trois auteurs (Yann, Jean Léturgie, Simon Léturgie). 

 
Quel est votre lien avec Franquin ? Que vous évoque-t-il, ainsi que son œuvre ?

Yann: Ma première rencontre avec Franquin remonte à 1973, dans une librairie de Marseille où il était venu dédicacer son Gaston Numéro 13 qui venait de sortir : Le voir dessiner Demesmaeker, Spirou, Moiselle Jeanne, une mouette, un chat ou un monstre a été l’événement déclencheur de ma décision de devenir auteur de BD ! Voir une telle magie sortir avec une telle apparente facilité, sans le moindre crayonné préparatoire, de la pointe de son petit feutre Tempo noir Xd-56b m’a littéralement pétrifié ! (J’en ai acheté des dizaines, de ces fichus feutres, aucun ne contenait la même magie, hélas !) C’était de la poésie à l’état pur ! J’ai ensuite rencontré André en 1979, à l’époque où Conrad et moi publiions nos Innommables dans Spirou ; quand il m’a avoué qu’il trouvait ça « marrant », j’ai failli crever d’orgueil !



Jean: Le premier contact que j’ai eu avec André Franquin a été pour lui demander un dessin pour la couverture des cahiers de la bande dessinée. Il a fait une magnifique illustration couleur avec Gaston, le petit Noel, l’évêque, tout ce petit monde franchissant un précipice sur la queue du Marsupilami … Il était très content de ce dessin et dans les mois suivants nous avons convenu de publier une sérigraphie avec cette illustration. Par la suite nous nous sommes vus régulièrement à Bruxelles et lors de différents festivals. Un jour, que Xavier Fauche et moi étions chez Morris pour une séance de travail sur Lucky Luke, André Franquin est arrivé à l’improviste et nous a proposé de travailler avec lui et Yvan Delporte sur un projet de dessin animé, « Les Tifou ». Pendant deux ans et 74 épisodes des Tifou, j’ai ainsi travaillé avec Franquin et pu constater à quel point, grâce à son dessin et à ses idées fulgurantes, il était capable de sublimer les scénarii que Delporte, Fauche et moi écrivions.



Simon: Jean, mon père, réalisait une interview d'André Franquin lorsque j'étais enfant. Je l'accompagnais et j'ai donc eu l'immense bonheur de le rencontrer. Dans sa très grande gentillesse, André Franquin me faisait de petits dessins pendant qu'il répondait aux questions. C'est là et grâce à Franquin qu'est née ma vocation. Plus tard, lors d'une séance de travail sur les tifou à laquelle j'assistais, j'ai pu montrer quelques pages au Maître qui m'a dit que je serai dessinateur de bandes dessinées. J'avais 15 ans, j'étais sur un nuage! Les livre d'entretiens « et Franquin créa Lagaffe » ainsi que le « Franquin/Jijé » de Vandooren faisaient partie de mes livres de chevet, j'ai été très imprégné par la vision qu'il donne du média, je suis certain que ça a profondément influencé mon travail depuis que j'ai choisi de pratiquer la bande dessinée. 


Comment est née l’idée de Gastoon ?

Jean: Chaque fois ou presque que je voyais Yann, il évoquait ce personnage que Franquin avait mis en scène dans des gags publicitaires et regrettait que rien ne soit fait avec. Il y a quelques années nous avions fait faire des essais à Simon pour voir ce que ca pouvait donner. En 2010 quand Jean-François Moyersoen a contacté Yann avec l’idée de faire « Gastoon », l’équipe s’est reformée naturellement. 





Quels sont les traits de caractère de ce Gastoon ?

Yann: Gastoon n’a pas (encore ?) le génie inventeur de son oncle ; il est comme les jeunes de son époque, très concerné par l’écologie, le respect de la nature, la sauvegarde de la planète. 



Simon: Il est blagueur, c'est le bon camarade toujours partant pour faire les 400 coups! Il est sautillant, joueur, ingénieux. 


Gastoon par Franquin © MARSU 2011


Dans quel univers évoluera Gastoon ?

Jean: Gastoon est un enfant d'environ dix ans. Il évolue donc dans un univers d’enfant. Volontairement nous faisons abstraction de sa maison et de ses parents. Nous avons dans un premier temps défini un certain nombre de lieux où se déroule l’action : la rue qui mène à l’école, le parc où les copains se réunissent, le réfectoire de l’école, la plage où ils vont tous en vacances.... 



Yann: Gastoon est avant tout un enfant, dont la principale préoccupation est d’ordre scolaire; pour l’aspect négatif, le rôle du « Longtarin de service » est assuré par Le perfide «Le Mat », le pion de son école dont la principale fonction semble être de persécuter Gastoon et ses copains et copines… De nombreux gags de cet album sont donc centrés sur la confrontation avec ce triste sire. Mais nous avons déjà plusieurs idées de nouveaux personnages qui apparaîtront dans les prochains albums. 


Comment avez-vous abordé la création de ce personnage ? Dans quelle mesure le travail de Franquin vous a-t-il inspiré ?

Jean: J’ai relu avec attention les Gaston de Franquin pour m’imprégner de l’ambiance, mais ne nous y trompons pas : Gastoon n’est pas Gaston même si physiquement il peut lui ressembler. Franquin l’avait défini dans ses trois gags comme un gamin dynamique, pétillant, inventif, moqueur, s’intéressant aux technologies modernes. Sensiblement différent de son tonton. Nous en tenons compte pour les gags que nous écrivons et nous lui avons ajouté une sensibilité écologique typique de notre époque. 



Simon: Le dessin de Franquin est changeant, évoluant en permanence. Il n'y a pas deux albums identiques. J'ai davantage essayé de retrouver un esprit Franquin plutôt que de singer son dessin, ce qui aurait figé le trait. Par « esprit Franquin », j'entends une grande tendresse envers les personnages qu'il animait et essayer d'être au plus juste dans les expressions, les anatomies, synthétiser le réel, avoir un univers mécaniquement juste. 


Gastoon par Léturgie © MARSU 2011

Vous travaillez à trois sur cet album : Yann et Jean Léturgie au scénario, Simon Léturgie au dessin. Comment s’organise le travail d’équipe ?

Jean: Nous sommes assez dispersés géographiquement mais aujourd’hui avec internet les distances ne sont plus les mêmes. Je vais cependant à Bruxelles régulièrement pour travailler en direct avec Yann. Simon nous fait part de ses envies de dessin et nous en tenons compte autant que possible. Puis nous lui proposons un certain nombre d’idées et Simon nous donne son accord ou pas. Ensuite nous scénarisons les gags choisis et Simon les dessine. Une dernière mise au point se fait une fois le dessin terminé pour peaufiner les dialogues. 


S’agit-il d’un album plutôt enfant ou adulte ?

Yann: Le public visé se limite exclusivement aux enfants en âge de lire et se termine avec la cataracte des plus âgés… (Dieu merci, il paraît que ça s’opère de mieux en mieux !)


Jean: Nous essayons d’être tous publics mais du fait que Gastoon est un enfant, je suppose que les albums seront classés plutôt «jeunesse» 


Cet album est-il le premier d’une longue série de Gastoon ?

Yann, Jean et Simon: Nous l'espérons ! 


Est-ce une longue histoire ou plein de gags courts ?

Jean: Tout comme pour Gaston, nous avons privilégié les gags en une page ; une longue aventure de Gastoon ne nous semblerait pas permettre d’exploiter son univers. Pour l’instant des gags en page, mais peut-être aurons nous plus tard la souplesse des « Gaston » c'est-à-dire, gags en strips, demie page, deux pages… 


© MARSU 2011

Un tout grand merci à Marsu Productions et à Philippe Nihoul pour le dossier de presse contenant ces informations.
Textes et visuels sont © MARSU 2011 by J.Léturgie – Yann – S. Léturgie

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