PHILIPPE ZYTKA A PROPOS DES "ECHAPPES"

Philippe Zytka évoque la première partie des Echappés - Opération Tonga aux éditions Soleil, avec Laurent Seigneuret au dessin (interview JJ Procureur)

Alors que les alliés sont sur le point de débarquer en Normandie, un escadron de pilotes de planeurs quitte Harwell en Angleterre le 6 juin 1944, pour être largué à proximité des lignes ennemies, sur le territoire français. Le but de cette équipe est de livrer des jeeps aux troupes de parachutistes canadiens à Varaville. Mais le vol d'approche ne se déroule pas comme prévu et les planeurs doivent être largués juste au dessus des lignes de DCA allemande, positionnées sur la côte. L'engin piloté par Steve Moss et Rod Taylor s'écrase dans la campagne normande, dans une zone mal identifiée.

 
Un sujet méconnu de la seconde guerre mondiale et surtout de la fameuse opération Overlord, le scénariste Zytka - familier des reconstitutions historiques du débarquement à travers la bande dessinée (Commando Kiefer avec Marcel Uderzo, la Nuit des Paras…) et le dessinateur Laurent Seigneuret (Carlisle, le Trésor du Temple, une production encore peu abondante mais en progression constante), s’y attellent très sérieusement et déroulent les évènement chronologiquement, sans fioriture, avec une documentation abondante et d’un intérêt certain. Un sacré bon récit de guerre, sans fioriture, sans héros, des hommes, des vrais, livrés à eux même. Ceci n’est pas du cinéma mais de la bonne BD bien réaliste, avec en bonus un dossier historique rendant hommage à ceux qui ont donné leurs tripes et leur vie pour la liberté !

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CORBASSON-AVRIL en viennent aux (4) mains

En quelques années seulement, François Avril est devenu le chouchou de Bruxelles, il enchaîne les expositions à un rythme d’enfer. Alors que son épouse, Dominique Corbasson, vient d’exposer à la galerie Champaka sur le thème de Paris, voici que monsieur et madame se retrouvent quelques cent mètres plus loin sur le Sablon, à la galerie Petits Papiers pour un exercice à quatre mains et une première expo belge commune. Dominique a apposé des tâches de couleurs sur le support, à charge pour François de les interpréter à sa manière. Le résultat est parfois bluffant ! Tenez-vous au milieu de la crypte de la galerie qui abrite l’essentiel des 4 mains, regardez autour de vous, vous ne verrez que des tâches de couleurs. Rapprochez-vous à présent et le dessin apparaît, tantôt incongru, tantôt si typiquement urbain d’Avril, tantôt surprenant ! L’exercice ne laisse en tout cas pas indifférent. Le trop de couleurs de Dominique Corbasson s’associe parfaitement, harmonieusement, avec le trop de blanc de François Avril !
Le rez de la galerie est consacré à une grande fresque longue de 19 tableaux de François Avril. Il vous prend par la main et vous emmène visiter son paysage urbain, avec ces bâtiments carrés et ses bonhommes filiformes. Au premier c’est au tour de Dominique Corbasson de s’exprimer, points de vue urbains détaillés alternent avec des paysages côtiers proches de l’abstraction, dans ce déluge de couleurs qui lui est si typique.


François Avril et Dominique Corbasson « WEST COAST » – à la galerie Huberty - Breyne [Petits Papiers Bruxelles] du 18 octobre au 10 novembre 2013 !

Ne ratez cela à aucun prix !

 zz corbavril

EVE SUR LA BALANCOIRE - ENTRETIEN AVEC NATHALIE FERLUT

Eve sur la balançoire ou conte cruel de Manhattan de Nathalie Ferlut est un biopic, un fait divers qui a secoué l’Amérique du début du siècle, une jeune beauté dont la mère (maquerelle) a vendu les courbes, la première pin up qui n’est pas resté papillon très longtemps, à peine quelques années et qui a vécu le restant de son existence dans l’ombre d’elle-même. Faut-il pour cela l’en blâmer ? Non, car elle n’est aucunement responsable de ce qui lui est arrivé. Son début de vie a été partagé entre trois hommes, sans doute pas les plus fréquentables : un riche aussi oisif qu’irresponsable, un vieux pédophile et un journaliste débutant qui plus tard deviendra un acteur célèbre et qui, quitte à choisir le moins pire des trois, aurait pu la tirer du bourbier dans lequel elle sa mère l’enfonçait inexorablement, s’arrangeant bien pour lui maintenir la tête sous l’eau. Elle finira par disparaître avec les « économies » rassemblées sur le compte de sa fille…
Nathalie Ferlut s’en tire avec tous les honneurs et cet ouvrage se laisse lire sans interruption et laisse un arrière-goût amer tant l’aplomb des personnages masculins tout comme la mère (maquerelle), est sordide, une exploitation sans vergogne, le tout raconté dans un récit très coloré qui sonne comme le conte de fée moderne que c’est, un conte bien cruel d’une modernité inattendue. La téléréalité au début du vingtième siècle.

eve 

GELUCK EX MACHINA, LA BIBLE SELON LE CHAT

geluck papeJ'ai adopté ce format particulier pour plusieurs raisons, je sais que mes fidèles lecteurs aiment avoir tous mes albums les uns à côté des autres et comme je me trouvais dans un récit au format à l’italienne - parce que dessiné sur appli - j’ai conçu ce coffret qui fait la taille habituelle de mes albums, avec deux albums, premier miracle de la bible qui permet de doubler mon tirage ! C’était complexe à imprimer le coffret, je ne voulais pas d’un truc chinois, mais après des recherches un imprimeur français a été trouvé, avec ce système de monocuvette. Cela fait un objet élégant, pour un prix – 96 pages par bouquin – 14,95 €, une prouesse technique pour un prix raisonnable. J’insiste auprès de mon éditeur pour rester dans des tranches de prix qui restent populaires parce que le Chat est un personnage toutes catégories sociales confondues, pour les fortunés, les gens normaux, les jeunes… Dans mes lecteurs, j’ai des philosophes ou des profs d’université très exigeants intellectuellement qui me disent que c’est formidable mais j’ai aussi le serrurier ou le flic du quartier qui adore !

Ce qui est important pour moi c’est que ce soit perçu de la même manière, c’est-à-dire que l’intellectuel pointu n’y trouve pas plus de choses que la crémière du quartier, parler à tout le monde de la même manière.

GUILLAUME SOREL A PROPOS D'HOTEL PARTICULIER

Il était une fois une jeune femme qui se suicide dans son appartement… une fin ? Non, le début de son histoire car elle va hanter l’immeuble qu’elle a habité et, avec la complicité d’un chat, elle va rencontrer tous ses habitants : petite fille mystérieusement disparue, amours illégitimes, bibliophile érotomane, vieille écorcheuse de chats. Et ce peintre sans le sou pour lequel notre fantôme ressent une attirance certaine…
 
Il était une fois plutôt que de nos jours tant cet album semble intemporel, l’action pouvant se situer hier comme il y a 50 ans… Guillaume Sorel abandonne les atmosphères sombres et angoissantes de ses premiers albums pour une histoire tout en justesse, en délicatesse, couvrant les pages d’un dessin qu’on croirait fait à l’aquarelle mais qui est à l’encre de chine noire, évoquant les vieilles photos délavées. Son lavis fait penser à un Hermann qui après ses séries s’est mis à faire ses one-shot de grande qualité, le même graphisme plein de lumière et de légèreté qui privilégie le blanc. Seul aux commandes, l’auteur fait évoluer son personnage selon son gré, avec lenteur, s’attardant sur tel et tel personnage, développant à l’envi et nous entraînant dans une histoire finalement très triste mais prenante qui aura une fin… heureuse. Guillaume Sorel, grand amateur de littérature fantastique, lui a déjà rendu hommage mais du côté gothique… Ici il a la retenue d’un immense auteur belge : Thomas Owen. Il indique même - par quelques cases montrant une bibliothèque - quels ouvrages le lecteur attentif pourrait parcourir pour retrouver ses sources d’inspiration…
Une belle œuvre qui prouve que l’auteur, après avoir puisé dans les ténèbres a pris goût à la lumière…

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